Soutenances de thèses – 2019

Yuxi LIU | UQAM-UA | 3 septembre | Les relations transnationales entre le Québec et la Chine populaire (1968-1980) : acteurs, savoirs, représentations

Direction: Yves Denéchère , co-direction: Martin PETITCLERC, Professeur Université du Québec à Montréal

Au Québec, l’intérêt pour la Chine populaire a émergé durant la deuxième moitié des années 1960, et s’est développé au cours de la décennie suivante. Animés par des motivations diverses, un certain nombre d’individus et de groupes se sont donné pour objectif de contribuer à véhiculer une meilleure image de la Chine au sein du peuple canadien et québécois. À travers divers prismes politiques, sociaux et culturels, ils ont appréhendé la Chine à leurs manières. Ils ont ainsi façonné les représentations de ce pays dans les sphères universitaire, politique et sociale du Québec. À travers l’étude de l’évolution, de la transmission et de la diffusion des perceptions et des connaissances de la Chine au sein de la société québécoise, notre thèse éclaire la contribution des acteurs non étatiques aux relations transnationales entre le Québec et la Chine pendant la période 1968-1980. En effet, dès avant la réception de la délégation chinoise par le gouvernement québécois en 1977, des individus et des réseaux associatifs ont coordonné des actions au niveau international, en agissant au sein d’institutions académiques, d’associations d’amitié et d’organisations politiques. Ces acteurs autonomes ont développé de nombreuses interactions avec la société chinoise en amont, au-delà et en deçà des relations interétatiques. Cette dimension a été trop négligée par l’historiographie des relations internationales du Québec qui est principalement centrée sur l’action étatique et la politique étrangère.

Dario VARELA | LMU | 4 novembre
Les réseaux hispanistes francais au début du XXème siècle – coopérations savantes et relations culturelles, France-Espagne-Amériques 1890-1930

Direction: Nathalie Richard

Florian FONTRIER | UBS | 22 novembre
De Sãwãkin à Berbera, l’intégration du littoral à l’hinterland, étude historique de la structuration des villes-ports et des flux à l’époque moderne (XVIe – XIXe siècle) : la spécificité de Tadjourah.

Direction: Sylviane Llinares

Au travers du cas moderne de Tadjoura nous proposons d’interroger à la fois le concept de ville-port et les possibilités d’élaborer une méthodologie historique efficace en l’absence de données textuelles avant le XIXe siècle. Ainsi, le littoral de la Corne, aride, étant impropre à l’établissement d’une société sédentaire sur la longue durée, le concept de ville y est donc paradoxal et résulte d’une cause extérieure, continentale ou extra-marine. Or Tadjoura présente, au sein des villes-ports modernes de la Corne de l’Afrique un caractère singulier par la morphologie de son implantation. Cette originalité est confirmée par l’histoire régionale qui montre que la création de Tadjoura en tant que ville est en lien avec l’ascension du royaume du Shäwa à partir du XVIIIe siècle, au contraire des autres villes-port du corpus Sâwâkin, Massawa’ et Zeyla’, reliées à des sphères ottomanes et arabes. N’ayant pas de sources écrites à disposition avant le XIXe siècle c’est à une étude en creux de l’histoire régionale qu’il faut s’en remettre afin de reconstituer une chronologie cohérente de Tadjoura. Enfin, l’archéologie, l’urbanisme et l’architecture pour leur part confortent les hypothèses historiques et géographiques et tendent à montrer que Tadjoura est un cas original de ville-port moderne générée par l’intérieur des terres mais aussi un site structurellement ‘afar a contrario du modèle arabo islamique qui prévaut sur la côte.

William TROUVE | UA | 30 novembre
Les listes de rois du Haut Moyen Âge. Origines, diffusions (Ve-ca. IXe siècle)

Direction Thomas Deswarte

Les listes de rois, rédigées dans le haut Moyen Âge occidental, sont des documents chronologiques qui dressent les noms des souverains ayant régné sur un même peuple. Les chercheurs ont principalement étudié ces sources pour déterminer les durées des règnes des souverains mentionnés. Nous nous proposons d’étudier ces textes selon une double perspective philologique et historique. Notre réflexion est élaborée à partir de trois axes de recherche : la rédaction des listes, leurs diffusions et leurs usages. Ils permettent de déterminer les spécificités de cette forme d’écriture. Dans un premier temps, nous étudions trois cas de listes qui accompagnent des codes de lois du haut Moyen Âge : la liste des rois des Lombards et l’Édit de Rothari, la liste des rois des Wisigoths et le Liber Iudiciorum, la liste des rois des Francs et la Loi salique. Nous restituons les logiques qui président à la rédaction et à la diffusion de ces documents et, ainsi, montrons que la copie de ces textes, qui exposent un discours sur le passé royal d’un peuple, répond majoritairement à des enjeux politiques et idéologiques. Dans un second temps, nous proposons une synthèse à propos des listes de rois. Nous tentons de déterminer en quoi ces textes relèvent d’une part d’héritage de la culture écrite romaine. L’identification des auteurs des listes permet de souligner les rôles octroyés à ce document au moment de sa création et les méthodes employées lors de la mise en liste. Il apparaît que l’élaboration et la circulation de ces textes répondent autant à des usages pratiques qu’à des enjeux mémoriels et politiques.

Matteo ANTONIAZZI | UA | 6 décembre
Le monastique face au politique : émergence d’un nouveau modèle de pensée du pouvoir d’après les auteurs d’Histoires ecclésiastique du Ve siècle

Direction: Philippe Blaudeau

Cette thèse porte sur le rôle du monachisme d’après les auteurs d’Histoires ecclésiastiques du Ve siècle : Socrate, Sozomène et Théodoret. Il s’agit en effet d’un tournant capital en matière d’interprétation de l’histoire chrétienne, du phénomène monastique et de l’histoire politique, en Orient romain tout spécialement. Ce processus permet une légitimation réciproque du monastique et du politique, non sans contestation, refus et résistance, qui signalent l’importance des rapports de force à l’œuvre. Cette étude permettra donc de mettre en perspective des dynamiques spécifiques de l’Empire romain, en misant sur l’apport interdisciplinaire (en dialogue avec la géographie notamment) en raison même de l’interaction nouvelle entre monastique et politique. Elle s’enrichira également de l’analyse de ses différentes interprétations indiquées ci-dessus comme d’autant d’élément de discours adressés aux hommes de pouvoirs (perçus d’une façon remarquablement plurielle puisque le charisme des renonçants interroge l’autorité des détenteurs de la fonction institutionnelle suprême). La thèse ainsi énoncée est susceptible de faciliter une meilleure compréhension des processus socioculturels en fonction desquels les modifications évoquées ont pu être pensées et susciter une série de conséquences. Bref, ce travail doctoral a pour but de mettre en évidence comment le rôle des moines a transformé le lien entre expression du pouvoir et réception dans les différents cercles susceptibles de fabriquer et de médiatiser le sens politique commun.

Jérémie BRUCKER | UA | 6 décembre
Avoir l’étoffe. Une histoire du vêtement professionnel en France des années 1880 à nos jours

Direction: Christine Bard

Dans le monde du travail, les lois, les règles, les normes, les codes et les usages font le vêtement. L’habillement au/de travail est une combinaison originale de vêtements fournis ou imposés par l’employeur et de vêtements laissés à l’appréciation du/de la travailleur.euse. Professionnel, de travail ou d’uniforme, l’habit revêt de nombreuses fonctions et symboliques : il cache, montre ou met en valeur le corps dans le but de servir l’entreprise à l’extérieur comme dans son organisation interne. Les profondes mutations du vestiaire professionnel depuis le XIXe siècle en font un objet d’étude historique de premier plan. Simplifiée, normalisée, voire supprimée, la tenue de travail implique l’intervention, la manipulation et le regard d’une multitude d’acteurs comme, par exemple, les dirigeants d’entreprise, les fabricants de vêtement, les travailleurs et les travailleuses ou encore les usager.e.s et les client.e.s. À la croisée de l’histoire économique, sociale, culturelle et des études de genre, il s’agit d’étudier le vêtement sous toutes ses coutures – couleurs, formes, matériaux – et d’analyser sa place dans l’organisation des entreprises, notamment à La Poste et à la SNCF. Cette thèse a également pour objet de mesurer le rôle du vêtement de travail dans la construction des identités sexuées personnelles et professionnelles afin d’évaluer le pouvoir des apparences dans les milieux professionnels français des années 1880 à nos jours.

Benjamin EGASSE | UBS | 6 décembre
L’État, la fortification et le littoral lorientais. Pouvoirs, économie et environnement d’un système défensif au XVIIIe siècle

Direction: Sylviane Llinares

Entre 1695 et 1815, la rade de Lorient située sur le littoral méridional breton accueille en son sein des activités économiques et militaires stratégiques du royaume de France. Les tensions et conflits franco-britanniques qui émaillent le XVIIIe siècle rendent nécessaire la mise en sécurité de cet espace. Par des campagnes successives, le littoral lorientais est doté d’un maillage complet de fortifications destiné à protéger les intérêts du royaume de France. L’étude de la construction du système défensif du littoral lorientais permet de comprendre dans quelles conditions s’effectue la construction de l’ensemble de ce dispositif et quels sont les effets de l’implantation et de l’exploitation de ce dernier, en analysant les données politiques, techniques, économiques, militaires, sociales et environnementales de l’aménagement du littoral dans le passé. Cet aménagement requiert des ressources financières importantes amassées grâce à l’Impôt. Sur le terrain, la concrétisation des volontés royales est aux mains des ingénieurs du roi qui se reposent à leur tour sur l’expérience des entrepreneurs du bâtiment devenus adjudicataires des « affaires du roi » en matière de défense. Ce duo doit travailler sous tension dans un contexte financier contraint, diplomatique et militaire tendu.

Magalie MOYSAN | UA | 11 décembre
Usages d’archives et pratiques d’archivage dans la recherche biomédicale de 1968 à 2006. L’exemple l’épidémiologie et de la génétique

Direction: Patrice Marcilloux

L’utilisation d’archives dans la recherche biomédicale apparaît comme un sujet peu traité dans la littérature. Il existe pourtant des usages spécifiques et originaux. Les deux spécialités étudiées ici, l’épidémiologie et la génétique, présentent des régimes disciplinaires distincts quant à leurs méthodes et leur positionnement scientifique mais s’inscrivent dans le temps long et se caractérisent par une utilisation de sources d’archives, affirmée et légitimée pour la première, marginale pour la seconde. Au-delà de la catégorisation des logiques de l’usage, ce travail analyse les leviers et les freins juridiques, techniques, sociaux et culturels à la réutilisation scientifique de sources préexistantes. Il met en exergue l’existence d’une véritable culture des archives en épidémiologie et en génétique des populations, à l’intersection entre les usages historiens et la tradition mathématique prégnante au sein de ces communautés. Pourtant, les services d’archives intermédiaires naissants peinent à trouver leur place dans l’accès aux sources ou dans l’archivage de la production scientifique. La mise en archives est perçue comme un outil de véridiction historique en génétique et un non-sujet en épidémiologie malgré des pratiques de conservation abouties. Elle pourrait offrir une recontextualisation après l’éloignement inhérent au processus de traduction visant à transformer les documents en informations, mais la reconfiguration totale et performative qu’elle induit constitue un frein à la réutilisation disciplinaire, invitant à reconsidérer les frontières des archives et les modalités de l’archivage en France.

Anne-Françoise CHEREL | UBS | 12 décembre
Céramiques de l’âge du Fer de la péninsule armoricaine (VIe-Ier siècles avant notre ère). Formes, décors, fonctions.

Direction: Dominique Frère

Depuis les années 2000, l’essor de l’archéologie préventive en Bretagne a notablement renouvelé notre approche de l’étude des mobiliers de l’âge du Fer, en particulier celle de la céramique, le matériel le plus fréquemment retrouvé sur tous les sites de cette période. Les ensembles exhumés se comptent en milliers de fragments et peuvent être sériés par la chronologie des excavations et des comblements. La nécessité de disposer de référentiels typo-chronologiques homogènes s’est imposée comme une priorité essentielle de la recherche actuelle, pour élaborer des synthèses à large échelle fondées sur un socle de données primaires fiables. Dans cette optique, les évolutions morphologiques et décoratives des céramiques du VIe au Ier siècle av. J.-C. de la péninsule armoricaine sont présentées. Centrées sur le second âge du Fer, elles tiennent compte des périodes d’occupation constatées sur de nombreux sites étudiés. Deux approches complémentaires originales permettent ensuite d’aborder les fonctions des types ainsi définis. La première s’intéresse au contenant, à partir de critères morphométriques et visuels, afin d’attribuer une ou plusieurs fonctions alimentaires à l’ensemble des types découverts sur les habitats : vaisselle de table, de cuisine et de stockage. Les autres fonctions des céramiques sont ensuite évoquées. La seconde approche est complètement nouvelle en Bretagne et fait appel à une méthodologie innovante, la chimie organique appliquée à l’étude des contenus des récipients gaulois. Les premiers résultats obtenus sont ici présentés. Certains, complètement inattendus, ont nécessité de les re-contextualiser grâce à une approche pluridisciplinaire.

Edern OLIVIER-JEGAT | UBS | 12 décembre
Océans et marines en paix. Missions et stations navales du XVIIIè siècle, étude comparative France et Angleterre (1763-1793)

Direction: Sylviane Llinares

Henriette KRE | UA | 14 décembre
L’anthroponymie à Leon : enjeux familiaux et culturels

Direction: Thomas Deswarte

L’onomastique, regroupant l’anthroponymie et la toponymie, connaît depuis une trentaine d’années un succès dans le milieu de la recherche. Dans toutes les disciplines, de nombreuses études sont consacrées à l’anthroponymie. L’objectif de notre travail sur l’anthroponymie léonaise médiévale est de dégager les principaux traits anthroponymiques de la société léonaise. Pour cette étude, nous avons eu recours aux sources diplomatiques et épigraphiques provenant de la cathédrale, de la collégiale et du monastère San Isidoro de León, ainsi qu’aux sources littéraires. Plusieurs méthodes ont été utilisées telles que le dépouillement et la confrontation des sources, le comptage de personnes, des noms et des différents systèmes anthroponymiques, l’élaboration de listes prosopographiques et la réalisation de généalogies. L’analyse des documents a permis de constater que le paysage anthroponymique léonais est changeant selon les époques. Concernant le système anthroponymique à deux éléments, il apparaît tôt à León (870) contrairement à l’ensemble des régions européennes, mais ne connaît le succès qu’à partir du XIème siècle. Aussi, fortement germanisé, le stock de noms subit une arabisation puis une christianisation après l’an mil, qui s’accompagne d’un resserrement du stock anthroponymique. Par ailleurs, l’arabisation en plus d’être une mode traduit des alliances matrimoniales et l’influence des califes. Quant à la christianisation, elle est le fruit de l’influence de certains cultes et le choix des fidèles laïcs. Sur le plan culturel, la fréquence des noms royaux exprime la domination d’une dynastie mais aussi l’identité du peuple. Cependant, les noms introduits dans le stock de noms de la famille royale par le mariage n’ont pas de succès et ne sont portés que dans la noblesse à l’exception du nom Ferdinand.

Floris TATON | UA | 16 décembre
Le féminisme dans les vies et les œuvres d’artistes de la performance en Europe et en Amérique du Nord entre 1980 et 2010

Direction: Christine Bard

Depuis les années 1970, le féminisme inspire les artistes de la performance. Cette décennie pionnière est très documentée, mais qu’en est-il pour les trois décennies suivantes ? Le féminisme dans les vies et les oeuvres d’artistes de la performance en Europe et en Amérique du Nord entre 1980 et 2010 propose, par le biais de vingt-cinq artistes dans dix-sept pays un état des lieux du féminisme de la deuxième et de la troisième vague. L’objectif de la recherche est d’éclairer les artistes de la performance et leurs productions au regard d’enjeux féministes. Trois volets sont abordés : les prémices des parcours des artistes, les sources et formes de l’influence féministe et sa place dans les oeuvres. La recherche concerne les artistes suivant.e.s : Lorraine O’Grady, Esther Ferrer, Mierle Laderman Ukeles, Kirsten Justesen, Marina Abramović, Maria Klonaris et Katerina Thomadaki, Pauline Cummins, Anne Bean, Ody Saban, Annie Abrahams, Vlasta Delimar, Verena Kyselka, Nieves Correa, Katarzyna Kozyra, Annika Ström, Iris Selke, Malin Arnell, Victoria Stanton, Carole Douillard, Eivind Reierstad, Mariuccia Pisani, Sands Murray Wassink, Marijs Boulogne et Mara Maglione.

Fiona CASEY | UA | 18 décembre
La correctionnalisation de l’avortement dans la France de l’entre-deux-guerres : les femmes pauvres face à la répression

Direction: Christine Bard

Entre 1810 et 1923 l’avortement en France est considéré comme un crime jugé en Cours d’Assises. La loi du 27 mars 1923, requalifie l’avortement en délit, le plaçant sous la juridiction du tribunal correctionnel. Une analyse de cette nouveauté pénale et des motivations de cette astuce juridique, révèlent comment un lobby conservateur construit une rhétorique de la « crise de dépopulation » et la manipulent pour faire adopter des lois régissant la fertilité féminine. Cette loi fait partie d’un arsenal juridique, auquel on peut ajouter les lois de 1920 et 1939, établit pendant l’entre-deux guerres pour maintenir la femme dans son rôle traditionnel de femme au foyer entourée d’enfants. Les promoteurs de ces lois estiment que seule la préservation de la famille patriarcale avec la mère « enceinte et pieds nus au cuisine » est la solution à ce qu’ils perçoivent comme un « débâcle démographique » qui ne cesse de s’aggraver depuis la Grande Guerre. Des historien-nes considèrent l’adoption des lois sur la réglementation de l’avortement comme un signe du pouvoir de ce mouvement antiféministe durant cette période. Néanmoins, leurs actions politiques ne parviennent pas à augmenter le taux de natalité avant la fin de la IIIe République. Comment pouvons-nous expliquer cet échec ? Qu’est -ce que cet échec nous apprend de l’histoire des femmes de l’entre-deux-guerres en France ? La réponse à ces questions est fournie grâce à une analyse détaillée de la rhétorique d’anti-avortement de ces militants familialistes-natalistes, mise en contraste avec des récits d’expériences réelles d’avortement rassemblées dans les procès-verbaux de quatre tribunaux correctionnels où se déroulent des procès pour avortement. Il y a une rupture complète entre la rhétorique familialiste-nataliste et la réalité de l’avortement, ce qui explique en partie l’échec de la politique répressive de l’époque. Les recherches dans les archives judiciaires montrent que les autorités judiciaires ne perçoivent pas l’avortement comme un problème de déclin de la population. Elles utilisent plutôt des enquêtes et des procès pour avortement non seulement pour condamner des femmes en vertu des dispositions de la loi, mais également pour les humilier méthodiquement en public afin de détruire leurs réputations. Ces juges, qui partagent la vision dominante sur le rôle social de la femme, se servent de ces procès comme un outil de contrôle social des femmes. Mais ce sont surtout des femmes de la classe populaire qui paient le prix le plus élevé pour leur choix d’avorter.

Hélène LAFFITTE | UA | 20 décembre
Expressions et organisation des personnes adoptées (enfant, adolescent, adulte) d’origine étrangère en France, depuis les années 1980 jusqu’à aujourd’hui.

Direction: Yves Denéchère

Le temps passant et les générations d’enfants devenant adultes, des personnes adoptées ont revendiqué un droit à la parole, à l’expression de leurs vécus et se sont rassemblées pour porter communément leur voix sur la scène publique. Des générations d’enfants adoptés sont devenues aujourd’hui des adultes capables de s’exprimer sur le sujet et sont parfois organisées en associations. Aujourd’hui, les organisations de personnes adoptées souhaitent être reconnues en tant qu’acteur à part entière de l’adoption au sein des institutions françaises de l’adoption, composées majoritairement d’associations de familles adoptives et professionnels de l’adoption, souvent eux-mêmes parents adoptifs. Ces associations de personnes adoptées souhaitent qu’une véritable réflexion soit possible afin d’améliorer le devenir adulte des enfants adoptés en recentrant le débat sur la personne adoptée elle-même et en la prenant comme point de départ de la réflexion. Ainsi a été créée en 1995 l’association Racines Coréennes, et en 2005, la Voix des Adoptés, par des jeunes adultes d’origines sud-américaines, puis en 2012, le Conseil national des adoptés, à l’initiative de responsables d’associations impliqués dans l’adoption, qui considèrent que les personnes adoptées ont une parole à porter. Au-delà de l’expression de soi, l’analyse des discours individuels et groupaux qui s’étend des récits numériques aux plaidoyers d’associations d’adoptés relève d’une stratégie d’agentivité visant à affirmer une posture citoyenne et à légitimer leur posture d’experts de l’adoption.