La nature dans les écritures de la déportation

La nature dans les écritures de la déportation

Programme

14h00 | Introduction | Yves Denéchère (professeur d’histoire contemporaine, Université d’Angers-TEMOS)

« L’arbre de Goethe » dans le camp de déportation de Buchenwald symbolise la permanence de la nature et de ce qu’elle peut représenter jusque dans les lieux les plus déshumanisés. Il est devenu l’un des emblèmes mémoriels du camp. Claude Lanzmann (disparu il y a quelques mois), a longuement donné à voir dans Shoah (1985) la nature qui, après la destruction de certains camps d’extermination par leurs constructeurs, a repris ses droits sur des terres ensanglantées. Les interventions de cette demi-journée interrogent le rapport des déporté.e.s avec la nature environnante. Le paysage, le climat, le végétal sont propices à des regards nouveaux sur l’écriture de la déportation par ceux qui l’ont endurée, qu’ils soient des écrivains reconnus ou des témoins qui ont été soucieux de laisser une trace.

14h15 | « « Le destin luxueux de la plante pourrissante ». Autour de la surdétermination du végétal en contexte concentrationnaire » | Lucie Bertrand-Luthereau (agrégée et docteure en lettres, IEP d’Aix-en-Provence – CHERPA)

Dans son récit concentrationnaire intitulé L’Espèce humaine, Robert Antelme suit la trame chronologique de sa détention et tisse autour de la réalité vécue une philosophie saisissante et neuve, issue d’une expérience infernale dans laquelle les valeurs sont renversées. Dans un passage clé de cet ouvrage, le détenu, épuisé par ce qu’on appellera plus tard les « marches de la mort », contemple la nature. Il livre alors une vision du végétal somptueuse et inédite, qui bouleverse la hiérarchie traditionnelle entre l’homme et la plante, la nature et le sort de celle-ci devenant douloureusement enviable. Robert Antelme n’est pas le seul rescapé dont les écrits témoignent d’un rapport nouveau et surdéterminé à la nature. Primo Levi, dans La Trêve, lui attribue le rôle vital d’antidote au « poison d’Auschwitz ».  C’est  à la nature si particulière de la surdétermination du végétal en contexte concentrationnaire que nous nous  attacherons dans cette communication.

15h00 | « Le rôle de la nature à Rawa-Ruska, d’après des témoignages de prisonniers » | Alexandre Millet (doctorant en histoire, Université d’Angers-TEMOS)

À partir du 13 avril 1942, des prisonniers de guerre français et belges sont internés dans un camp de représailles à Rawa-Ruska, situé près de Lviv dans le Gouvernement Général de Pologne. Le « camp de la goutte d’eau et de la mort lente » se trouve aux abords de la ville. La nature apparait de différentes manières dans des récits d’anciens prisonniers du camp : la végétation est d’abord utilisée par les internés sous-alimentés pour se nourrir. Ensuite, les variations météorologiques extrêmes ont un impact sur l’aspect visuel du paysage et par conséquent sur le moral du captif et sur son état physique. Enfin, situé dans le « triangle de la mort », Rawa-Ruska est tout proche du théâtre de nombreux massacres de masse. Le dernier point envisagera la nature dans une perspective mémorielle.

15h45-16h00 Pause

16h00 | « De fougères en cimetières : écriture et réécriture du végétal dans deux récits de déportation de Pierre Gascar » | Cristiana Oghina-Pavie (maîtresse de conférences en histoire contemporaine, Université d’Angers-TEMOS) et Isabelle Trivisani (maîtresse de conférences en lettres modernes, université d’Angers-3L.AM)

Après la Seconde Guerre mondiale où il connut l’enfermement, Pierre Gascar devient écrivain et publie une soixantaine d’œuvres : parmi elles, Le Temps des morts livre un témoignage sur le camp de Rawa-Ruska. Il faudrait en fait parler non pas d’un, mais de plusieurs témoignages, car l’ouvrage paru en 1953 – en même temps que Les Bêtes qui lui valut le prix Goncourt – est repris et profondément reconfiguré par son propre auteur au moins à deux reprises aussi bien sur le plan de la longueur que du titre, mais aussi des contenus. Malgré sa dimension biographique, le récit nous offre ainsi des versions multiples du vécu d’une même expérience par le même homme : au sein de cet ensemble protéiforme, quelques constantes tout de même, un cimetière à entretenir, désherber et fleurir et, pour cette raison, un motif, le végétal, qui fait partie des éléments récurrents de l’œuvre de Pierre Gascar. Mais de même qu’il n’y a pas une mais au moins trois œuvres, de même on ne rencontre pas qu’un mais au moins deux cimetières et de même encore le végétal ne saurait se présenter de façon unifiée mais mouvante à travers une écriture qui, au fil des mutations, en transforme les espèces, la place et la symbolique.

16h45 | Lecture d’extraits littéraires de L’espèce humaine de Robert Antelme et de Le temps des morts et Le règne végétal de Pierre Gascar | Par Matéo Droillard

17h15 Fin

JE croisées: Quand il est difficile de gouverner

Durant quatre années, le programme ANR EUROPANGE s’est attaché à étudier dans le temps long (XIIIe-XVe siècles) un type spécifique de construction politique à l’échelle régionale, posant au souverain angevin et à ses agents de nouveaux défis administratifs et politiques en matière de gouvernement. À partir de la figure de l’officier, qui s’entend de manière plurielle selon les territoires angevins considérés (Anjou, Maine, Provence, Lorraine, Italie du Sud et Sicile, Piémont, Lombardie et Toscane, Hongrie, Pologne, Morée, Albanie), il s’est agi de s’intéresser à la formation, aux compétences et aux réseaux de ces hommes qui prennent en charge le fonctionnement d’institutions structurantes du pouvoir (chancellerie et administration, justice, armée, finances, diplomatie…). Chargés de missions diverses et variées, ces hommes sont des acteurs et des relais d’un pouvoir personnel souvent absent, toujours itinérant, et dans le cadre de territoires dissociés, ils semblent à l’écoute des populations, jouant en quelque sorte le rôle de ciment institutionnel.

Les journées d’études croisées qui se tiendront à Nîmes en juin 2019, puis à Angers en novembre 2019, sont envisagées comme une sorte de contre-pied aux axes de recherche qui ont été travaillés dans le cadre du projet EUROPANGE. Nous souhaitons ancrer notre réflexion dans le temps long (XIIe-première moitié du XVIe siècle), c’est-à-dire envisager le Moyen Âge classique et l’aube des temps modernes, période clé en matière d’inventions, d’innovations et de changements d’un point de vue institutionnel, politique et juridique. En effet, cette période se distingue par la mise en place de pouvoirs forts, la structuration progressive d’une mosaïque d’États en Europe, de grands mouvements de part et d’autres de la Méditerranée tels que les croisades ou les projets qui y sont liés. Se dessinent alors des résistances parfois fortes, des transactions, des compromis ou encore des statu quo qui peuvent apparaître entre le gouvernement et la population qui lui est sujette : là se situe le coeur des réflexions de nos journées d’études. De nombreux travaux ont abordé l’action de gouverner, le fonctionnement et l’organisation des gouvernements eux-mêmes ou bien encore les différentes approches concernant les révoltes ou les contestations. Tout en utilisant les apports de ces champs de recherche, l’objectif de ces journées d’étude est bien d’aller plus loin en tentant d’identifier le plus finement possible ce qui, chez les gouvernés, est irréductible et les rend inflexibles, hermétiques, en quelque sorte allergiques au pouvoir qui devient dès lors vécu et ressenti uniquement comme une contrainte qu’il faut combattre. Ce refus est-il le fruit de stratégies individuelles ou collectives ? Est-ce une question de culture politique ? Est-ce en raison des structures même de la société qui ne conviendraient pas à certains ? Qu’est-ce qui, au fond, pousse certains à rejeter clairement, en théorie (les textes, les mots…) comme en pratique (les actes), l’hétéronomie ? Pourquoi à un moment donné la norme est-elle vécue comme quelque chose de subi au point pour certains de refuser de vivre selon des règles communes ?

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Les propositions de communication sont à envoyer à Isabelle Mathieu et Isabelle Ortega avant le 15 décembre 2018. Les travaux retenus permettront d’établir une programmation thématique cohérente entre les deux sites qui sera communiquée aux intervenants en janvier 2019. Les communications pourront se faire en anglais, en français et en italien.

L’émergence du domaine public maritime XIe-XIXe siècles

Programme

Jeudi 8 novembre

14h Accueil – Brigitte Schmauch
Introduction – Sylviane Llinares & Aurélie Hess

Session 1 – Concevoir et observer

14h30
Sylviane Llinares – Daniel Chardon et la vision du DPM à la veille de la Révolution
Christian Pfister – Pour faire respecter les amirautés, le regard de Chardon sur leur personnel, un enjeu de taille
André Zysberg – De Le Masson du Parc à Chardon, les enquêtes sur le rivage au XVIIIe siècle. L’exemple de la Normandie (1724-1783)
Discussion

Vendredi 9 novembre
Session 2 – Organiser et contrôler

09h30
Mathias Tranchant – La fiscalité dans les ports de la France atlantique, XIe- XVe siècle
Jacques Peret – L’estran des naufrages à la fin du XVIIIe siècle
Stéphane Durand – Les aménagements portuaires à la fin du XVIIIe siècle : état des lieux
Discussion

Session 3 – Arbitrer et partager

14h00
Gilbert Buti – Pêcheries fixes et domaine public maritime sur les côtes de la France méditerranéenne (1603-1853)
Thierry Sauzeau – Le domaine public maritime sur les côtes atlantiques (1792-1853) : de la disparition à la restauration
Romain Grancher – À qui appartiennent les rivages ? Pêcheries, gens de mer et droit de concession (littoral de la Manche, XIXe siècle)
Discussion

 

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Journée d’études « Qu’est ce que la démocratie sanitaire ? »

Le projet DEMOS a pour but de penser dans le temps long, en lien avec les enjeux et les acteurs contemporains, les différentes formes d’aspirations à la démocratie sanitaire dans plusieurs dimensions : organisations, idéologies, lieux d’expression, typologie des acteurs, objets de mobilisation. Un des objectifs du projet est d’identifier les facteurs et les moments qui poussent les citoyens, malades ou non, à s’investir dans le champ de la santé, c’est-à-dire à ne pas résumer leur rôle à celui de consommateur.

Pour cette première rencontre du projet nous proposons de réunir des spécialistes des sciences humaines et sociales qui présenteront de manière synthétique leurs travaux ainsi que des acteurs de la santé (associations, élus, soignants) qui présenteront leurs expériences de terrain, pour ensemble débattre à propos des acteurs, des formes et des thèmes de l’intervention citoyenne dans le champ de la santé.

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Journée de recherche organisée par Hervé GUILLEMAIN, Nahema HANAFI et Sylvain VILLARET, avec la participation financière du CPER DI2L2S de la Région Pays de la Loire.

Journée d’étude « La lettre et la machine »

Qu’elle relève d’une pratique « sur mesure » ou d’une pratique « centrée sur la personne », la médecine personnalisée, par-delà les innovations techniques ou théoriques qu’elle peut mettre en branle n’intervient pas sur un terrain vierge. Depuis le XVIIIe siècle en effet, la médecine s’est pratiquée à distance, soit par le biais de communications épistolaires, soit par l’introduction au domicile d’outils et de machines propres à réaliser l’autodiagnostic et l’automédication des sujets souffrants. La médecine la plus réputée des Lumières s’est diffusée par correspondances. Au siècle suivant la clinique au lit du malade et l’essor d’un réseau de professionnels de santé n’ont pas fait disparaître cette tradition toujours portée par certains praticiens, notamment les tenants des nouvelles médecines alternatives. Les outils miniatures portatifs sont entrés dans les intérieurs, dès la fin du XVIIIe siècle sous la forme de machines électriques. Ils nous sont aujourd’hui devenus familiers lorsqu’il s’agit de mesurer tension ou glycémie. L’entrée dans l’ère numérique introduit de nouvelles manières de s’informer, de consulter, de se soigner dans le champ somatique ou psychique.

Cette journée d’étude interrogera les enjeux et les modalités du soin à distance et de l’auto-soin à domicile sur la longue durée afin de saisir ce qui fait irruption depuis quelques années dans la télémédecine.

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